Pratique

Pépinières et confinement

Coup d’arrêt soudain, en pleine période de ventes

Publié le 14/11/2020 | par Aline Fontaine

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Pour les pépinières Sonnendrucker, à Truchtersheim, l’automne représente 40 % des ventes de l’année.
Aline Fontaine
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Christophe Sonnendrucker se demande si ses clients jardineront en décembre, faute de flâner dans les marchés de Noël.
Aline Fontaine

Pour les pépiniéristes, l’automne représente une saison clé dans les ventes annuelles. Pendant le confinement, ces exploitants agricoles peuvent rester ouverts, mais petit à petit, ils viennent grossir les rangs des victimes collatérales de cette crise sanitaire. Exemple au magasin Pépinières - Fleurs & Paysages Sonnendrucker, à Truchtersheim.

Une silhouette apparaît dans la pépinière Sonnendrucker, à Truchtersheim. L’homme au pantalon de travail retire ses gants et regarde autour de lui. Pendant quelques secondes, au milieu des 6 hectares de plantation, il se sent un peu seul. Il est 13 h 30, c’est l’unique client du moment. Il finit par trouver Céline, la vendeuse. « Je voulais savoir si vous aviez un éléagnus, un grand », insiste-t-il. Patrick est en train de construire une piscine chez lui, il veut embellir le pourtour. « J’en ai déjà un chez moi. C’est un bel arbre aux feuilles vertes et dorées au soleil, persistant, qui ne perd pas ses feuilles en hiver », décrit cet habitant du village.

Quelques secondes plus tard, le jardinier amateur trouve son bonheur. Il sait que c’est le moment de planter, alors ne pas croiser d’autres clients le surprend. « Peut-être que les gens ont peur de venir », émet-il. Lui s’est arrêté sur le retour du travail, à tout hasard. « C’est seulement le 11e client de la semaine, et nous sommes déjà jeudi », recense Christophe Sonnendrucker, un brin dépité. Cette fois, c’est sûr, le compteur n’affichera pas 278 clients, comme la semaine passée.

« Dès que le président a annoncé l’arrivée du confinement, les clients qui devaient récupérer des commandes étalées sur deux-trois semaines ont voulu tout récupérer d’un coup. C’était la fin du monde pour eux, et impossible à gérer pour nous », raconte ce grand quinquagénaire qui a repris l’entreprise familiale en 1996, et qui dirige maintenant une équipe de 12 salariés pépiniéristes, horticulteurs, paysagistes, maraîchers, ou encore fleuristes.

 

C’est la saison des plantations , n’hésitez pas à nous faire part de votre demande d’arbres , arbustes , et conifères le tout local bien sûr

Publiée par Pépinières-Fleurs et paysages Sonnendrucker sur Mardi 3 novembre 2020

 

Besoin de rassurer

Le téléphone sonne. « Oui, oui, vous pouvez passer », répète le pépiniériste, à travers son masque aux couleurs pastel. À demain. » Ces derniers jours, il passe beaucoup de temps à rassurer les indécis qui appellent. « Les clients ne savent pas s’ils ont le droit de venir, et quoi inscrire sur leur attestation », constate-t-il. Pourtant son magasin peut rester ouvert, seule l’activité fleuriste est en suspens. « Nous sommes avant tout des agriculteurs puisque nous produisons des arbres. »

Situation compliquée, et mal tombée puisque l’automne représente une des deux saisons phare de l’année avec le printemps, et compte pour 40 % du chiffre d’affaires. Ce coup d’arrêt soudain dans la fréquentation de son établissement, Christophe Sonnendrucker le vit un peu comme un coup de massue, d’autant que les particuliers forment la majorité de ses clients, devant les paysagistes et collectivités du coin. « En plus, le premier confinement a chamboulé les pratiques des gens. Comme ils ne font plus de grands voyages, ils peaufinent leur jardin. Cet été, tout le monde voulait des arbres d’ombrage, alors que d’habitude nous ne voyons personne », s’étonne l’exploitant, qui appréhende même une rupture de stock en albbizzias ou mûriers à fleurs de platane : du jamais vu !

 

Chers clients, La pépinière reste ouverte pendant le confinement avec les mêmes horaires d'ouverture à savoir de 8h30 à...

Publiée par Pépinières-Fleurs et paysages Sonnendrucker sur Vendredi 30 octobre 2020

 

Faute de marchés de Noël

Depuis le printemps, sa sphère d’influence a ainsi grandi. Rien qu’aux portes ouvertes, mi-octobre, il a enregistré 35 % de ventes supplémentaires par rapport à l’année dernière. « Avant, les gens venaient de 15 km à la ronde, maintenant j’ai des clients de Phalsbourg ou de Wissembourg. Ils me disent qu’il n’y a pas grand-chose par chez eux. Ceux qui allaient en jardinerie se tournent aussi vers nous, pour avoir plus de conseils », remarque ce responsable qui a investi dans la simulation de jardins à l’entrée du site, « pour donner des idées ».

Quand cet engouement reprendra-t-il ? « Peut-être en décembre, s’aventure-t-il. D’habitude, c’est un mois quasiment mort, comme les gens ont la tête dans les marchés de Noël. S’ils sont annulés, est-ce que les clients se remettront au jardin, tant qu’il ne gèle pas, pour anticiper ce qu’ils ont prévu de planter au printemps prochain ? Et est-ce que cela suffira pour compenser nos pertes de novembre ? »

Beaucoup trop d’interrogations pour Christophe Sonnendrucker qui s’inquiète déjà de ne pas pouvoir vendre ses quelques sapins de Noël dans les semaines à venir. « Eh oui, si la situation empire et que nos dirigeants imposent de tout fermer ? Mais ils ne vont pas nous enlever ça quand même. C’est pour le moral des gens. Si les familles ne peuvent pas se réunir à Noël, qu’elles aient au moins le décor. » Un lot de consolation incertain en cette période si inédite, en attendant des jours meilleurs. La maison devait célébrer ses 90 ans cette année. La fête a été reportée.

Aline Fontaine

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